L'anglais Mikuś est un savant perfectionniste qui nous confirme que le vrai talent est souvent condamné à l’ombre.
Difficile à décrire, le Dub de Mikuś est à la fois atypique et très classique. Les basses sont ici monstrueuses et les rythmes, provenant de percussions variées, sont parés de légers accents stepper, le tout arrangé par un mixage qui confine au génie ! De très nombreux samples et effets vintages d’inspiration orientale d’une richesse rare rendent sa musique passionnante, nous sommes ici très loin du simple couple basse-batterie même s’il reste le cœur de chaque morceaux.
Sur le titre "Dub Mirror" il offre un terrain d’expression fantastique au trompettiste Kevin Robinson, qui a entre autres joué avec Ray Charles, George Benson, Desmond Decker et Lauryn Hill (c’est le moment du hochage de tête admiratif), sa trompette venant s’ajouter aux multiples couches d’effets issus de l'imagination débordante de Mikuś.
En plus de ses propres productions, il mix du dub, du reggae, de la drum’n bass, de la techno hardcore, du jazz, du funk, de la soul, des enregistrements africains introuvables et d’autres pépites old school de la vaste histoire musicale électronique de Londres ; c’est donc quelqu’un de très fréquentable.
NDrake
Release: Mikuś - Dub Mirror (2009)
Tuesday, 12 June 2018
Release: Thundermother - No Red Rowan (1971)
Monday, 11 June 2018
Avec ses riffs monumentaux et ses sons psychédéliques teintés de stoner rock et de doom métal (en 1971 !), ce petit bijou fera votre bonheur pour peu que vous vous soyez déjà complètement perdu dans les méandres obscures de l’ère heavy psych-rock des 70’s.
Il n’existe pas d’informations fiables sur l’histoire de Thundermother et sur ce "No Red Rowan" qui sera leur unique album. Il semblerait qu’il ait été enregistré à Wakefield en un weekend par une bande de musiciens du studio du jeune label Holyground créé en juillet 1966. Naviguant entre rock psychédélique musclé ("The People Show"), folk bluesy ("Woman") et distorsions majestueuses, l’auditeur sera même amené à croiser une "Coke Version" de la piste "Boogie Music", un truc avec un mixage complétement barré qui donne quelques clés de compréhension de l’état d’esprit du groupe.
Et pour la petite histoire, Holyground est le premier label anglais indépendant. Ils n’avaient aucun liens avec quelque organisation que ce soit, pressaient eux-mêmes leurs LPs et assuraient l’ensemble de la distribution et de la vente : "From ideas to music, pressing to record player it was only us!". Du beau boulot en somme.
Il n’existe pas d’informations fiables sur l’histoire de Thundermother et sur ce "No Red Rowan" qui sera leur unique album. Il semblerait qu’il ait été enregistré à Wakefield en un weekend par une bande de musiciens du studio du jeune label Holyground créé en juillet 1966. Naviguant entre rock psychédélique musclé ("The People Show"), folk bluesy ("Woman") et distorsions majestueuses, l’auditeur sera même amené à croiser une "Coke Version" de la piste "Boogie Music", un truc avec un mixage complétement barré qui donne quelques clés de compréhension de l’état d’esprit du groupe.
Et pour la petite histoire, Holyground est le premier label anglais indépendant. Ils n’avaient aucun liens avec quelque organisation que ce soit, pressaient eux-mêmes leurs LPs et assuraient l’ensemble de la distribution et de la vente : "From ideas to music, pressing to record player it was only us!". Du beau boulot en somme.
Release: Black Uhuru - Black Uhuru (1980)
Tuesday, 8 May 2018
Produit par Sly & Robbie et backé par les Revolutionaries, le groupe maison du label Channel One de Joseph "Jo Jo" Hookim, Black Uhuru est la réédition par Virgin un an plus tard de Showcase, le deuxième album de Black Uhuru, trio de choc composé de Derrick "Duckie" Simpson, Michael Rose et Sandra "Puma" Jones. Cette réédition se voit enrichie de la géniale piste Shine Eye Gal, un bien bel ajout.
C’est un classique parmi les classiques, Leaving To Zion, Guess Who’s Coming To Dinner, Abortion,… chacune des pistes justifie à elle seule l’écoute de l’album. C’est également un album à faire découvrir à ceux qui pensent que le reggae sonne toujours pareil, l’écoute de cette captivante pépite leur ouvrira sûrement les yeux, et les oreilles ! Les lignes de basses sont très marquées, et de réels efforts de compositions ont été fait au niveau de l’ambiance assez dub, des claviers et multiples effets électroniquesvenant en effet renforcer le caractère unique et moderne de chaque piste.
Black Uhuru sortira l’album Sinsemilla un an après, et son triangle d’or sera complet dès 1981 lors de la sortie de Red, ces trois albums restant des références aujourd’hui tant ils sont bourrés à craquer de ces sons délicieux qui sont de ceux qui ont marqués le reggae.
Le jour de la fin du monde, pensez à prendre l'album Black Uhuru dans votre sac de survie !
C’est un classique parmi les classiques, Leaving To Zion, Guess Who’s Coming To Dinner, Abortion,… chacune des pistes justifie à elle seule l’écoute de l’album. C’est également un album à faire découvrir à ceux qui pensent que le reggae sonne toujours pareil, l’écoute de cette captivante pépite leur ouvrira sûrement les yeux, et les oreilles ! Les lignes de basses sont très marquées, et de réels efforts de compositions ont été fait au niveau de l’ambiance assez dub, des claviers et multiples effets électroniquesvenant en effet renforcer le caractère unique et moderne de chaque piste.
Black Uhuru sortira l’album Sinsemilla un an après, et son triangle d’or sera complet dès 1981 lors de la sortie de Red, ces trois albums restant des références aujourd’hui tant ils sont bourrés à craquer de ces sons délicieux qui sont de ceux qui ont marqués le reggae.
Le jour de la fin du monde, pensez à prendre l'album Black Uhuru dans votre sac de survie !
Release: Byetone - Death Of A Typographer (2008)
Thursday, 26 April 2018
Superstar de l’underground, Byetone explore les limites extrêmes de la musique électronique minimaliste et construit une nouvelle expérience alternant longues plages atmosphériques, techno glitch et minimale industrielle.
Olaf Bender, l’homme qui se cache derrière Byetone, est, à l’origine, le cofondateur du label allemand de Techno Raster-Noton avec Frank Bretschneider, que votre nom soit sanctifié, amen, et le responsable de son identité visuelle, cette dernière étant directement reconnaissable à ses formes géométriques minimalistes avares en couleurs (exception à la règle, le magique album "OR" du franchy Kangding Ray, doré, comme il se doit).
La musique de Byetone est une transe contenue dans d’interminables montées, une approche sous tension d’une explosion qu’on sent imminente mais qui ne se produit jamais, un balancement entre techno étourdissante ("Grand Style") et extase atmosphérique (les merveilles "Capture This I" et "Capture This II"), entre froideur calculée et chaleur communicative.
Minimal mais généreux, "Death Of A Typographer" est une excellente introduction au catalogue de ce label qui délivre une techno transie et ouatée à la rigueur implacable.
Olaf Bender, l’homme qui se cache derrière Byetone, est, à l’origine, le cofondateur du label allemand de Techno Raster-Noton avec Frank Bretschneider, que votre nom soit sanctifié, amen, et le responsable de son identité visuelle, cette dernière étant directement reconnaissable à ses formes géométriques minimalistes avares en couleurs (exception à la règle, le magique album "OR" du franchy Kangding Ray, doré, comme il se doit).
La musique de Byetone est une transe contenue dans d’interminables montées, une approche sous tension d’une explosion qu’on sent imminente mais qui ne se produit jamais, un balancement entre techno étourdissante ("Grand Style") et extase atmosphérique (les merveilles "Capture This I" et "Capture This II"), entre froideur calculée et chaleur communicative.
Minimal mais généreux, "Death Of A Typographer" est une excellente introduction au catalogue de ce label qui délivre une techno transie et ouatée à la rigueur implacable.
Release: Lonely Kamel - Blues For the Dead (2010)
Thursday, 26 April 2018
Deuxième album de Lonely Kamel, Blues For the Dead est une combinaison presque parfaite de stoner rock et de psychédélisme, le tout balancé avec un bon gros son heavy tout droit venu des 70’s.
Ah la Norvège… deuxième pays d’Europe le moins densément peuplé, alors comment se fait-il qu’on y trouve autant de bon groupes au mètre carré, principalement avec des noms improbables et des artworks géniaux ? Thomas Brenna à la guitare et au chant, Stian Helle à la basse, Lukas Paulsen à la guitare et Espen Nesset à la batterie sont aux affaires depuis 2005, leur premier album Lonely Kamel est sorti en 2008 et cette seconde livraison est un excellent album auquel il est impossible de résister, on sent que les mecs se sont éclatés à l’enregistrer.
S’ouvrant sur la piste "A Tale Of A Madman", Lonely Kamel construit méticuleusement un album addictif et entrainant (les quasi singles "Wasted Time" et "A Million Years From Home") en puisant le meilleur de chaque musicien : la voix claire de Thomas Brenna faisant des merveilles une fois mêlées aux variations de rythmes géniales soutenues par leur son de basse qui vous caresse dans le sens du poil (l’incroyable "The Boys" qui lorgne du coté du Doom).
De "Stick With Your Plan", perle de stoner qui se fini sur des accords de basses dantesques, au dernier titre "The Trip", trip psychédélique de 10 minutes à dos d’ampli dans le désert, en passant par le classique "Lady Mushroom", l’ombre de Led Zeppelin n’est jamais bien loin de cette source de chaleur venue d’Oslo dans laquelle on ne peux que vous inviter à vous plonger, ça vous fera du bien.
Ah la Norvège… deuxième pays d’Europe le moins densément peuplé, alors comment se fait-il qu’on y trouve autant de bon groupes au mètre carré, principalement avec des noms improbables et des artworks géniaux ? Thomas Brenna à la guitare et au chant, Stian Helle à la basse, Lukas Paulsen à la guitare et Espen Nesset à la batterie sont aux affaires depuis 2005, leur premier album Lonely Kamel est sorti en 2008 et cette seconde livraison est un excellent album auquel il est impossible de résister, on sent que les mecs se sont éclatés à l’enregistrer.
S’ouvrant sur la piste "A Tale Of A Madman", Lonely Kamel construit méticuleusement un album addictif et entrainant (les quasi singles "Wasted Time" et "A Million Years From Home") en puisant le meilleur de chaque musicien : la voix claire de Thomas Brenna faisant des merveilles une fois mêlées aux variations de rythmes géniales soutenues par leur son de basse qui vous caresse dans le sens du poil (l’incroyable "The Boys" qui lorgne du coté du Doom).
De "Stick With Your Plan", perle de stoner qui se fini sur des accords de basses dantesques, au dernier titre "The Trip", trip psychédélique de 10 minutes à dos d’ampli dans le désert, en passant par le classique "Lady Mushroom", l’ombre de Led Zeppelin n’est jamais bien loin de cette source de chaleur venue d’Oslo dans laquelle on ne peux que vous inviter à vous plonger, ça vous fera du bien.
Release: Lulu Rouge - Bless You (2008)
Thursday, 26 April 2018
Froid et sans faille, le duo danois Lulu Rouge s’offre un premier album en forme de messe noire à la beauté toute scandinave.
Le Danemark est une monarchie et si, pour l’instant, à Copenhague, c’est Trentmøller qui est assis sur le trône (il a d’ailleurs produit quelques morceaux de Bless You), Thomas "DJ T.O.M" Bertelsen et Torsten "Buda" Bo Jacobsen font office de très sérieux prétendants.
Le morceau d’ouverture, "Melankoli", annonce tout de suite la couleur ; noire, comme celle du trou qui s’apprête à vous absorber. A peine lancé, le duo fait preuve d’une maîtrise ahurissante vous empêchera de décrocher de l’album avant la dernière note. Premier coups de violons, vite rejoins par la voix d’Alice Carreri Pardeilhan, l’assemblage est parfait, la textures sonore incroyablement dense.
"It’s only raining because of you,
I’ll drink the water if you do.
They’re softly fallin’,
Close your eyes and see,
They’ll keep on dancing, for me."
Lulu Rouge… Bless You… cette photo en noir et blanc sans légende, il semblerait que tout ait été fait pour surprendre l’auditeur qui, poussé par la curiosité, se retrouvera soudainement face à 53 minutes de basses (très) profondes servant une tech house deep techniquement irréprochable. Du frénétique et anxiogène "Lulu’s Theme" au dub-esque et minimale "Thinking Of You" sur lequel Tuco pose sa voix, tout ici regorge d’ambiances métalliques lorgnant du côté de la minimale berlinoise.
Lulu rouge propose des compositions qui, loin d’être uniformes et introverties (la "Sweeter Than Sweet" peut-être orientée club, l’angélique "Ninna Ninna" avec de nouveau Alice Carreri Pardeilhan au chant, la bande son idéale d’une fuite nocturne qu’est "Runaway Boy"), sauront aller au delà des limites étroites du genre tout au long de cet album très intense qui, malgré seulement 10 pistes, ne se laissera pas oublier. Antoine de Saint-Exupéry disait qu’"il semble que la perfection soit atteinte non quand il n’y a plus rien à ajouter, mais quand il n’y a plus rien à retrancher", ce n’est pas les auditeurs de Bless You qui le contrediront.
Qui aurait pensé que les basses fréquences, une fois domptée, seraient d’autant plus majestueuses ?
Le Danemark est une monarchie et si, pour l’instant, à Copenhague, c’est Trentmøller qui est assis sur le trône (il a d’ailleurs produit quelques morceaux de Bless You), Thomas "DJ T.O.M" Bertelsen et Torsten "Buda" Bo Jacobsen font office de très sérieux prétendants.
Le morceau d’ouverture, "Melankoli", annonce tout de suite la couleur ; noire, comme celle du trou qui s’apprête à vous absorber. A peine lancé, le duo fait preuve d’une maîtrise ahurissante vous empêchera de décrocher de l’album avant la dernière note. Premier coups de violons, vite rejoins par la voix d’Alice Carreri Pardeilhan, l’assemblage est parfait, la textures sonore incroyablement dense.
"It’s only raining because of you,
I’ll drink the water if you do.
They’re softly fallin’,
Close your eyes and see,
They’ll keep on dancing, for me."
Lulu Rouge… Bless You… cette photo en noir et blanc sans légende, il semblerait que tout ait été fait pour surprendre l’auditeur qui, poussé par la curiosité, se retrouvera soudainement face à 53 minutes de basses (très) profondes servant une tech house deep techniquement irréprochable. Du frénétique et anxiogène "Lulu’s Theme" au dub-esque et minimale "Thinking Of You" sur lequel Tuco pose sa voix, tout ici regorge d’ambiances métalliques lorgnant du côté de la minimale berlinoise.
Lulu rouge propose des compositions qui, loin d’être uniformes et introverties (la "Sweeter Than Sweet" peut-être orientée club, l’angélique "Ninna Ninna" avec de nouveau Alice Carreri Pardeilhan au chant, la bande son idéale d’une fuite nocturne qu’est "Runaway Boy"), sauront aller au delà des limites étroites du genre tout au long de cet album très intense qui, malgré seulement 10 pistes, ne se laissera pas oublier. Antoine de Saint-Exupéry disait qu’"il semble que la perfection soit atteinte non quand il n’y a plus rien à ajouter, mais quand il n’y a plus rien à retrancher", ce n’est pas les auditeurs de Bless You qui le contrediront.
Qui aurait pensé que les basses fréquences, une fois domptée, seraient d’autant plus majestueuses ?
Release: Savages - Five Finger Discount (2008)
Thursday, 26 April 2018
Ah Five Finger Discount... Tout droit venu de Hongrie, c’est un pur trésor de groove comme on en trouve que rarement !
Peu d’infos filtrent sur Savages ; à part qu’il est le boss du label hongrois Mana Mana basé à Budapest dont le slogan "Easy Jazzy Electronica" pourrait être la devise de la glandouille le dimanche aprem, que c’est un véritable génie de l’instrumentation et du sample et qu’il sait en faire beaucoup sans en faire trop tout en parsemant ses œuvres de voix charmeuses et sensuelles ("Long Distances") on ne sait pas grand chose.
Bourré de pépites et autres merveilles de composition comme "Lookin’ For You", "Happy Gallopers (Mr. Bird Jazz remix)", "You’re My Chocolate" ou encore l’envolée funky "Turtle Dance" avec DRS qui est décidément dans tous les bon plans, l’album présente quinze pistes raffinées au style miraculeusement homogène et cohérent malgré la grande variété de rythmes et d’influences allant du funk (le délirant "Get Back To Me" à la production parfaite) au trip-hop en passant par la soul, le jazz, le rap instrumental et même le rock sur l’énergique "The Blow".
Après la sortie de Five Finger Discount qui reste son unique et fantastique album, Savages, Nándor Kürtössy de son vrai nom, a crée avec le DJ Suefo le groupe Savages y Suefo qui a sorti l’album bariolé Wordstyle en 2012, n’hésitez pas à aller y jeter une oreille aussi, c’est de la bonne.
Peu d’infos filtrent sur Savages ; à part qu’il est le boss du label hongrois Mana Mana basé à Budapest dont le slogan "Easy Jazzy Electronica" pourrait être la devise de la glandouille le dimanche aprem, que c’est un véritable génie de l’instrumentation et du sample et qu’il sait en faire beaucoup sans en faire trop tout en parsemant ses œuvres de voix charmeuses et sensuelles ("Long Distances") on ne sait pas grand chose.
Bourré de pépites et autres merveilles de composition comme "Lookin’ For You", "Happy Gallopers (Mr. Bird Jazz remix)", "You’re My Chocolate" ou encore l’envolée funky "Turtle Dance" avec DRS qui est décidément dans tous les bon plans, l’album présente quinze pistes raffinées au style miraculeusement homogène et cohérent malgré la grande variété de rythmes et d’influences allant du funk (le délirant "Get Back To Me" à la production parfaite) au trip-hop en passant par la soul, le jazz, le rap instrumental et même le rock sur l’énergique "The Blow".
Après la sortie de Five Finger Discount qui reste son unique et fantastique album, Savages, Nándor Kürtössy de son vrai nom, a crée avec le DJ Suefo le groupe Savages y Suefo qui a sorti l’album bariolé Wordstyle en 2012, n’hésitez pas à aller y jeter une oreille aussi, c’est de la bonne.
Release: The Mighty Diamonds - Right Time (1976)
Thursday, 26 April 2018
Remontons le temps ensemble au sein de cette bulle musicale radieuse de simplicité et de talent qui rafraîchissait les esprits échauffés des quartiers les plus violents de Kingston, l’âge d’or des studios Channel One. Enregistrant tour à tour The Heptones, Dennis Brown, Jackie Mittoo, Horace Andy, Burning Spear, Bob Marley & The Wailers… et, en 1976, l’un des éléments les plus connus et sacrés du reggae, l’album Right Time de The Mighty Diamonds.
Pour la petite histoire, c’est le groupe "maison" du label Channel One, The Revolutionaries, qui back les Mighty Diamonds sur cet album. Constitué de plusieurs musiciens de Kingston rassemblés autour du batteur Sly Dunbar et du bassiste Robbie Shakespeare, c’est en leur sein que les deux membres du légendaire duo de producteurs Sly & Robbie jouèrent ensemble à leurs débuts.
De la sincérité et des good vibes, voilà un duo gagnant quand on veut régner aux côtés des plus grands dans le monde du reggae. Des thèmes alarmants aussi, mais un ton serein ; déconcertant pour un occidental qui cherche l’explication à tout, le désir de tout classer et tout comprendre, plutôt que d’apprécier simplement le résultat.
Là, le caractère brûlant et anti-conformiste tranche avec leur décontraction, le tout mouliné par le talent d’arrangement des Studios One. Le trio de chanteurs de The Mighty Diamonds (Lloyd "Judge" Ferguson, Donald "Tabby" Shaw et Fitzroy "Bunny" Simpson) est connu pour être un des rares à se produire encore aujourd’hui, sans qu’aucun des membres n’ai jamais quitté le groupe.
Un pur instant de plaisir sur vinyle original, qui donne un peu plus le sentiment de se retrouver à cette époque d’insouciance, avant l’apparition des formats numériques, des sons re-masterisés et de Mylène Farmer (ça faisait longtemps, c’est gratuit, c’est comme ça).
Pour la petite histoire, c’est le groupe "maison" du label Channel One, The Revolutionaries, qui back les Mighty Diamonds sur cet album. Constitué de plusieurs musiciens de Kingston rassemblés autour du batteur Sly Dunbar et du bassiste Robbie Shakespeare, c’est en leur sein que les deux membres du légendaire duo de producteurs Sly & Robbie jouèrent ensemble à leurs débuts.
De la sincérité et des good vibes, voilà un duo gagnant quand on veut régner aux côtés des plus grands dans le monde du reggae. Des thèmes alarmants aussi, mais un ton serein ; déconcertant pour un occidental qui cherche l’explication à tout, le désir de tout classer et tout comprendre, plutôt que d’apprécier simplement le résultat.
Là, le caractère brûlant et anti-conformiste tranche avec leur décontraction, le tout mouliné par le talent d’arrangement des Studios One. Le trio de chanteurs de The Mighty Diamonds (Lloyd "Judge" Ferguson, Donald "Tabby" Shaw et Fitzroy "Bunny" Simpson) est connu pour être un des rares à se produire encore aujourd’hui, sans qu’aucun des membres n’ai jamais quitté le groupe.
Un pur instant de plaisir sur vinyle original, qui donne un peu plus le sentiment de se retrouver à cette époque d’insouciance, avant l’apparition des formats numériques, des sons re-masterisés et de Mylène Farmer (ça faisait longtemps, c’est gratuit, c’est comme ça).
Release: Thomas Schumacher - Is Not (2006)
Thursday, 26 April 2018
En musique comme dans de nombreuses formes d’expressions artistiques, chaque mouvement apparaît en réaction au précédent. Le brouillon punk réagissait violemment aux dérives pompières du rock progressif, la techno avec son obsession des lignes pures, des beats clairs et de l’anonymat, s’élevait contre l’égocentrisme et le verbiage du rock. Mais chaque scène bénéficie également en son sein de ses remises en question esthétiques.
Née dans les années 80, la techno aussi connut ses dérives. Ainsi au début des années 90, la Techno dite "minimale" est apparue en réaction aux formes commerciales d’une house music devenue insipide et d’une techno trop rapide et trop forte, entièrement bâtie autour de beats bourrins et d’effets de manche artificiels.
Dépouiller la techno de ses artifices, lui faire subir une cure d’amaigrissement puis la déconstruire encore et encore jusqu’à ses plus extrêmes limites. Dans le domaine du minimalisme pur, cette musique est un exercice équilibriste de statisme et d’hypnose.
La persistance du beat, d’une rigueur implacable, est ici à peine déséquilibrée par des basses omniprésentes qui élèvent l’ensemble à l’expression ultime d’un immobilisme impossible. La techno minimale est un appel à la danse qui n’arrive jamais. Un pur exercice de frustration, entièrement cérébral, et pourtant totalement fascinant. Une véritable expérience.
Née dans les années 80, la techno aussi connut ses dérives. Ainsi au début des années 90, la Techno dite "minimale" est apparue en réaction aux formes commerciales d’une house music devenue insipide et d’une techno trop rapide et trop forte, entièrement bâtie autour de beats bourrins et d’effets de manche artificiels.
Dépouiller la techno de ses artifices, lui faire subir une cure d’amaigrissement puis la déconstruire encore et encore jusqu’à ses plus extrêmes limites. Dans le domaine du minimalisme pur, cette musique est un exercice équilibriste de statisme et d’hypnose.
La persistance du beat, d’une rigueur implacable, est ici à peine déséquilibrée par des basses omniprésentes qui élèvent l’ensemble à l’expression ultime d’un immobilisme impossible. La techno minimale est un appel à la danse qui n’arrive jamais. Un pur exercice de frustration, entièrement cérébral, et pourtant totalement fascinant. Une véritable expérience.
Release: A Guy Called Gerald - Essence (2000)
Wednesday, 25 April 2018
Déjà quelques années que Gerald Simpson, a.k.a. A Guy Called Gerald, a quitté sa Manchester natale pour s’établir à New York. Après avoir été le créateur du tube acid house Voodoo Ray en 1988, 11 ans de bons et loyaux services au sein du groupe 808 State et une solide réputation de poids lourd de la scène underground britannique, un changement d’air ne pouvait faire que du bien !
Et le résultat est ce Essence, où A Guy Called Gerald semble s’être inspiré d’un New York imaginaire, comme un point de chute sur une planète lointaine et étrange baignée de musique délicate.
Ce qu’on nous sert ici est de la haute couture instrumentale, des breakbeats de jungle se faisant oublier par instant pour mieux réapparaitre, des chanteurs et chanteuses à la voix filtrée, quelques effluves jazzy capturées à contre-jour, la réminiscence ciselée d’une musique que l’on appelle aujourd’hui old school qui, tout en ayant perdu son image de modèle, garde son aura de source première.
Et le résultat est ce Essence, où A Guy Called Gerald semble s’être inspiré d’un New York imaginaire, comme un point de chute sur une planète lointaine et étrange baignée de musique délicate.
Ce qu’on nous sert ici est de la haute couture instrumentale, des breakbeats de jungle se faisant oublier par instant pour mieux réapparaitre, des chanteurs et chanteuses à la voix filtrée, quelques effluves jazzy capturées à contre-jour, la réminiscence ciselée d’une musique que l’on appelle aujourd’hui old school qui, tout en ayant perdu son image de modèle, garde son aura de source première.
Release: Above the Law - Livin’ Like Hustlers (1990)
Saturday, 14 April 2018
Gros classique de la côte ouest, avec ses samples très axés sur le funk et la soul des années 70 et son nom qui sonne comme ton dealer à la porte un jour de dèche, "Livin’ Like Hustlers", le premier album d’Above the Law, ouvre les 90’s de la plus belle façon qui soit.
Produit par Above the Law, Laylaw et deux des membres de N.W.A, Dr. Dre et Eazy-E (excusez du peu), l’album commence sans détour avec le violent "Murder Rap" et son fameux sample de sirène (qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler le "Hellifornia" de Gesaffelstein... enfin, ce serait plutôt l’inverse).
La suite, langoureuse et gangsta à souhait, est plus calme et étonnamment variée pour l’époque, on retrouve pêle-mêle des titres plutôt funky comme "Untouchable" et "Freedom Of Speech" (ah ce sample du "Message From the Soul Sisters" de Vicki Anderson, toujours aussi bon), le très gangsta lover "Ballin’", l’excellent et groovy "Livin’ Like Hustlers" ou encore le funk passé au bullet time d’"Another Execution" (qui sample le "Do Your Thing" de Lyn Collins et le "Good Old Music" de Funkadelic) qui ferait presque passer Snoop Dogg pour un cachet de vitamine C.
Cold 187um, KMG the Illustrator, DJ Total K-Oss et Go Mack, les quatre membres d’Above the Law se font un petit plaisir sur la dernière piste de l’album, "The Last Song", en invitant la belle brochette Dr. Dre, Eazy-E et MC Ren (les trois MC de N.W.A après le départ d’Arabian Prince et d’Ice Cube) à venir leur prêter main forte pour un final éclatant, un morceau fleuve de plus de 6 minutes, rarissime pour l’époque !
Produit par Above the Law, Laylaw et deux des membres de N.W.A, Dr. Dre et Eazy-E (excusez du peu), l’album commence sans détour avec le violent "Murder Rap" et son fameux sample de sirène (qui n’est d’ailleurs pas sans rappeler le "Hellifornia" de Gesaffelstein... enfin, ce serait plutôt l’inverse).
La suite, langoureuse et gangsta à souhait, est plus calme et étonnamment variée pour l’époque, on retrouve pêle-mêle des titres plutôt funky comme "Untouchable" et "Freedom Of Speech" (ah ce sample du "Message From the Soul Sisters" de Vicki Anderson, toujours aussi bon), le très gangsta lover "Ballin’", l’excellent et groovy "Livin’ Like Hustlers" ou encore le funk passé au bullet time d’"Another Execution" (qui sample le "Do Your Thing" de Lyn Collins et le "Good Old Music" de Funkadelic) qui ferait presque passer Snoop Dogg pour un cachet de vitamine C.
Cold 187um, KMG the Illustrator, DJ Total K-Oss et Go Mack, les quatre membres d’Above the Law se font un petit plaisir sur la dernière piste de l’album, "The Last Song", en invitant la belle brochette Dr. Dre, Eazy-E et MC Ren (les trois MC de N.W.A après le départ d’Arabian Prince et d’Ice Cube) à venir leur prêter main forte pour un final éclatant, un morceau fleuve de plus de 6 minutes, rarissime pour l’époque !
Release: Jayo Felony - Take A Ride (1995)
Saturday, 14 April 2018
Dans le sillage du "Doggystyle" de Snoop Dogg sorti en 1993, ce sont des légions de gangsta rappeurs anonymes qui envahissent les ondes en 94 et 95. Jayo Felony s’en démarquera par ses revendications et la vision sombre qu’il donna de la côte ouest.
Durant les années 90, le label Def Jam cherchait à mettre en avant des talents issus de scènes régionales variées afin de ne pas se concentrer uniquement sur New York, et on peut dire qu’ils ont eu l’oreille ! Parmi plusieurs excellentes pioches (il faut bien citer Richie Rich d’Oakland et Warren G de Long Beach), ils signent Jayo Felony, originaire de San Diego sur la côte californienne. Malgré le fait que ces rappeurs n’aient pas, en leur temps, égalés la reconnaissance de leurs collègues de la côte est, il est plus que juste de reconnaître aujourd’hui la grande qualité leurs productions. Le catalogue Def Jam constitué au cours de ces quelques années comprend un important héritage de singles, EP et albums méconnus.
Ce premier album de Jayo Felony offre donc des sonorités typiques du gangsta rap de l’époque, avec en prime des titres en forme de véritables leçons g-funk comme "Bitch I’m Through", mais dont la légèreté ne doit pas masquer les paroles qui évoquent abondamment le thème de l’incarcération. Alors qu’en 1995 le nombre de détenus en Californie atteint de nouveaux sommets et que les discussions sur l’adoption de lois renforçant les peines en cas de récidives sont pour le moins houleuses, il s’agit bien ici d’un album de contestation et de revendications.
Les lignes de basses sont affirmées et les beats lourds, à consonance presque industrielle sur "Homicide" ou sur le fabuleux "Can’t Keep A Gee Down". Jayo Felony impressionne en tant que parolier, pas de rime pour rien ou d’ego trip, c’est un sentiment de rage difficilement contenue qui domine tout au long de cet album.
Le bondissant "Funk 2 Da Head" et le funk bien heavy de "Take A Ride" clôturent cet album essentiel du gangsta rap qui, presque 20 ans après sa sortie, continue de frapper fort.
Durant les années 90, le label Def Jam cherchait à mettre en avant des talents issus de scènes régionales variées afin de ne pas se concentrer uniquement sur New York, et on peut dire qu’ils ont eu l’oreille ! Parmi plusieurs excellentes pioches (il faut bien citer Richie Rich d’Oakland et Warren G de Long Beach), ils signent Jayo Felony, originaire de San Diego sur la côte californienne. Malgré le fait que ces rappeurs n’aient pas, en leur temps, égalés la reconnaissance de leurs collègues de la côte est, il est plus que juste de reconnaître aujourd’hui la grande qualité leurs productions. Le catalogue Def Jam constitué au cours de ces quelques années comprend un important héritage de singles, EP et albums méconnus.
Ce premier album de Jayo Felony offre donc des sonorités typiques du gangsta rap de l’époque, avec en prime des titres en forme de véritables leçons g-funk comme "Bitch I’m Through", mais dont la légèreté ne doit pas masquer les paroles qui évoquent abondamment le thème de l’incarcération. Alors qu’en 1995 le nombre de détenus en Californie atteint de nouveaux sommets et que les discussions sur l’adoption de lois renforçant les peines en cas de récidives sont pour le moins houleuses, il s’agit bien ici d’un album de contestation et de revendications.
Les lignes de basses sont affirmées et les beats lourds, à consonance presque industrielle sur "Homicide" ou sur le fabuleux "Can’t Keep A Gee Down". Jayo Felony impressionne en tant que parolier, pas de rime pour rien ou d’ego trip, c’est un sentiment de rage difficilement contenue qui domine tout au long de cet album.
Le bondissant "Funk 2 Da Head" et le funk bien heavy de "Take A Ride" clôturent cet album essentiel du gangsta rap qui, presque 20 ans après sa sortie, continue de frapper fort.
Release: Mala - Changes / Forgive (2007)
Saturday, 14 April 2018
Histoire d’enterrer définitivement la soupe radiophonique (on déposera des fleurs sur les tombes de ceux tombés sous les balles de Fun radio), montez le son pour profiter pleinement de ce single bien trempé sorti à l’occasion d’une escapade solo de Mala, moitié du duo Digital Mystikz fondé avec Coki.
Qu’avons-nous à opposer à cette mentalité collective glorifiant le consumérisme individuel et au matérialisme d’aujourd’hui ? Au désespoir et au nihilisme qu’ils fabriquent ? A la misère symbolique et sociale qu’ils nourrissent ? A défaut de religion ou d’utopie, il reste l’art et la culture, et tout ce qu’ils ont la capacité de permettre et d’inventer : des liens sociaux plus riches, de l’estime de soi, un surcroît d’humanité et, surtout, un enrichissement de ses perceptions.
Mala, c’est le fondateur touche à tout du label Deep Medi, source intarissable d’albums incroyablement bien produits depuis 2006. Deep Medi rassemble des producteurs qui ont en commun de garder à l’esprit ce qui définissait le dubstep en premier lieu, ce qui faisait qu’il était ce qu’il était avant sa récupération. Les différentes productions du label sont ainsi restées fidèles à ce son du dubstep originel, au-delà des pièges tendus par les modes.
Se disant privilégié de pouvoir présenter lors de ses sets des compositions nouvelles et des raretés méconnues, Mala propose une musique censée et intemporelle qui n’arrivera, pour son écrasante majorité, jamais à l’oreille du grand public, ni de Jason Derülo (c’était gratuit je sais). Après un "Changes" ultra classique qu'on ne présente plus, arrive "Forgive", un beat guerrier en accord parfait avec une ligne de basse profonde pour une montée irrésistible qui dissiperait n’importe quel brouillard assombrissant l’horizon.
Qu’avons-nous à opposer à cette mentalité collective glorifiant le consumérisme individuel et au matérialisme d’aujourd’hui ? Au désespoir et au nihilisme qu’ils fabriquent ? A la misère symbolique et sociale qu’ils nourrissent ? A défaut de religion ou d’utopie, il reste l’art et la culture, et tout ce qu’ils ont la capacité de permettre et d’inventer : des liens sociaux plus riches, de l’estime de soi, un surcroît d’humanité et, surtout, un enrichissement de ses perceptions.
Mala, c’est le fondateur touche à tout du label Deep Medi, source intarissable d’albums incroyablement bien produits depuis 2006. Deep Medi rassemble des producteurs qui ont en commun de garder à l’esprit ce qui définissait le dubstep en premier lieu, ce qui faisait qu’il était ce qu’il était avant sa récupération. Les différentes productions du label sont ainsi restées fidèles à ce son du dubstep originel, au-delà des pièges tendus par les modes.
Se disant privilégié de pouvoir présenter lors de ses sets des compositions nouvelles et des raretés méconnues, Mala propose une musique censée et intemporelle qui n’arrivera, pour son écrasante majorité, jamais à l’oreille du grand public, ni de Jason Derülo (c’était gratuit je sais). Après un "Changes" ultra classique qu'on ne présente plus, arrive "Forgive", un beat guerrier en accord parfait avec une ligne de basse profonde pour une montée irrésistible qui dissiperait n’importe quel brouillard assombrissant l’horizon.
Release: Sam Gopal - Escalator (1969)
Saturday, 14 April 2018
Je ne me suis jamais demandé d’où venait Lemmy. Il est là, c’est tout. Mais chaque évènement est nécessairement la conséquence d’un événement précédent et, avant d’être le grand amateur d’alcool, de drogues, de femmes, chanteur et bassiste de Motörhead mondialement adulé que l'on connait, Lemmy était grand grand amateur d’alcool, de drogues, de femmes, chanteur et bassiste d’Hawkwind.
La transition entre les deux groupes se fit (presque) sans trop de douleur : après avoir été arrêté en possession d’amphétamines à la frontière canadienne alors que la dernière chanson qu’il écrivit pour Hawkwind s’appelait Motörhead, il partit créer son propre groupe, le reste du groupe l’ayant laissé en plan. Mais avant Hawkwind ?
Et bien avant, Lemmy naviguait entre les volutes de fumée de la douce année 1969 et affutait son jeu en compagnie de Sam Gopal, un malaisien leader du groupe du même nom et joueur de tabla (une percussion originaire du nord de l’Inde) qui prend ici la place de la batterie. Leur unique album, "Escalator", est sorti en 1969 sur le tout jeune label Trojan (créé un an auparavant et qui ne tardera pas à devenir mondialement célèbre pour ses productions reggae et dub), et honnêtement, ça sent le bon vieux rock’n roll et la fumée à des kilomètres !
Ian "Lemmy" Willis (comme mentionné dans le livret) assure le chant et la lead guitare avec une maestria déconcertante, et le résultat est que rien n’est à jeter, toutes les pistes de l’album sont géniales. Les ambiances psychédéliques très présentes et le jeu travaillé sont complétés par un son de basse rythmé et puissant. Les balades comme "Yesterlove" sont également magnifiques (Lemmy est alors âgé de 24 ans et à une voix encore en très bon état), et l’album contient même une reprise de "Season Of the Witch" de Donovan qui vous emmènera loin, très loin… A se procurer sans attendre, un album rare.
La transition entre les deux groupes se fit (presque) sans trop de douleur : après avoir été arrêté en possession d’amphétamines à la frontière canadienne alors que la dernière chanson qu’il écrivit pour Hawkwind s’appelait Motörhead, il partit créer son propre groupe, le reste du groupe l’ayant laissé en plan. Mais avant Hawkwind ?
Et bien avant, Lemmy naviguait entre les volutes de fumée de la douce année 1969 et affutait son jeu en compagnie de Sam Gopal, un malaisien leader du groupe du même nom et joueur de tabla (une percussion originaire du nord de l’Inde) qui prend ici la place de la batterie. Leur unique album, "Escalator", est sorti en 1969 sur le tout jeune label Trojan (créé un an auparavant et qui ne tardera pas à devenir mondialement célèbre pour ses productions reggae et dub), et honnêtement, ça sent le bon vieux rock’n roll et la fumée à des kilomètres !
Ian "Lemmy" Willis (comme mentionné dans le livret) assure le chant et la lead guitare avec une maestria déconcertante, et le résultat est que rien n’est à jeter, toutes les pistes de l’album sont géniales. Les ambiances psychédéliques très présentes et le jeu travaillé sont complétés par un son de basse rythmé et puissant. Les balades comme "Yesterlove" sont également magnifiques (Lemmy est alors âgé de 24 ans et à une voix encore en très bon état), et l’album contient même une reprise de "Season Of the Witch" de Donovan qui vous emmènera loin, très loin… A se procurer sans attendre, un album rare.
Release: The Sacred Mushroom - The Sacred Mushroom (1969)
Saturday, 14 April 2018
Disposant d’un artwork et des attributs les plus typiques de la bande-son idéale d’un trip aux champis ou au LysergSäureDiethylamid (oui il est parfois important de mettre en avant le fait que tout le monde connait un acronyme en allemand), cet album s’avère être du rock psychédélique plutôt doux, à un petit détail prêt.
Comparé à du Cream (à leur album "Fresh Cream" de 1966 pour être précis) par beaucoup, cet unique album du groupe de Cincinnati dans l’Ohio est toutefois dépourvu de ce côté baroque et pop que l’on peut trouver (que je trouve) si insupportable chez les anglais de Cream. Il ne s’agit donc pas ici de multiplier les sons en tout genre pour faire inspiré, mais de capter l’énergie si spéciale qui agita le rock cette année-là.
Cet album semble encore aujourd’hui jugé durement par la critique, on doit encore pouvoir sentir son âme tourmentée en quête de reconnaissance hanter les disquaires aux quatre coins du monde. Car, s’il ne s’agit pas du disque de la décennie qui bouleversa les codes, je le vois bien figurer dans la liste du top 10 des pépites oubliées de l’année en question. Des pistes comme "You Won’t Be Sorry" sont exactement ce que l’amateur éclairé pas obsédé par le psyché pur recherche en trainant ses guêtres vers l’année 69… Et je n’ai jamais vu personne zapper et passer à la piste suivante à l’écoute de "I’m Not Like Everybody Else".
Trop souvent comparé, il est temps d’oublier le reste pendant 34 minutes et de prendre ce "The Sacred Mushroom" pour ce qu’il est : un formidable témoin de l’époque et du sursaut de création qui eut lieu à l’orée des années 70.
Comparé à du Cream (à leur album "Fresh Cream" de 1966 pour être précis) par beaucoup, cet unique album du groupe de Cincinnati dans l’Ohio est toutefois dépourvu de ce côté baroque et pop que l’on peut trouver (que je trouve) si insupportable chez les anglais de Cream. Il ne s’agit donc pas ici de multiplier les sons en tout genre pour faire inspiré, mais de capter l’énergie si spéciale qui agita le rock cette année-là.
Cet album semble encore aujourd’hui jugé durement par la critique, on doit encore pouvoir sentir son âme tourmentée en quête de reconnaissance hanter les disquaires aux quatre coins du monde. Car, s’il ne s’agit pas du disque de la décennie qui bouleversa les codes, je le vois bien figurer dans la liste du top 10 des pépites oubliées de l’année en question. Des pistes comme "You Won’t Be Sorry" sont exactement ce que l’amateur éclairé pas obsédé par le psyché pur recherche en trainant ses guêtres vers l’année 69… Et je n’ai jamais vu personne zapper et passer à la piste suivante à l’écoute de "I’m Not Like Everybody Else".
Trop souvent comparé, il est temps d’oublier le reste pendant 34 minutes et de prendre ce "The Sacred Mushroom" pour ce qu’il est : un formidable témoin de l’époque et du sursaut de création qui eut lieu à l’orée des années 70.
Release: Uncle Acid & The Deadbeats - Blood Lust (2011)
Saturday, 14 April 2018
Après avoir découvert la musique grâce au rock et à ses "monstres sacrés" en pleine adolescence, c’est tout naturellement que je me suis ensuite lentement mais sûrement détourné de tout ce qui faisait entendre riffs, breaks de batterie, claviers et lignes de basses autres que ceux créés par ordinateur.
Malgré cela, l’absence totale de rock dans les médias fait que le manque se fait rapidement sentir. Heureusement, le catalogue sans fin du stoner, du rock psychédélique, du doom, etc., avec chacun leur lot de beautés mélodiques et d’atrocités techniques plus ou moins distordues est un puissant remède, tant auditif que visuel. Car c’est d’abord par son artwork que "Blood Lust" se démarque : le visage cauchemardesque d’une silhouette noire se détachant d’un fond uniforme au violet douteux sur lequel vient s’imprimer le nom du groupe, de l’album et des pistes à l’inspiration mystique, occulte et meurtrière ("Death’s Door", "I’m Here To Kill You", "13 Candles",…).
Deuxième essai des anglais, "Blood Lust" est un véritable choc et une réelle surprise. Combien de déconvenues en écoutant de bons albums mais au final utilisant toujours la même recette (et je pèse mes mots) ? Uncle Acid & The Deadbeats sont les artisans d’un son nouveau et frais, tout y est excellent et hautement addictif, c’est un groupe du présent qui s’est fait piquer ses idées dans les années 70 ! Et cette voix retro se fondant parfaitement dans une mer de riffs visqueux que Black Sabbath n’aurait pas renié !
Peu importe que vous soyez fâchés avec le rock rugueux ou que l’ambiance comateuse du doom vous fasse vous tenir à l’écart, jetez-vous sur ce "Blood Lust", un de ces albums qui vous font revoir vos standards à la hausse.
Malgré cela, l’absence totale de rock dans les médias fait que le manque se fait rapidement sentir. Heureusement, le catalogue sans fin du stoner, du rock psychédélique, du doom, etc., avec chacun leur lot de beautés mélodiques et d’atrocités techniques plus ou moins distordues est un puissant remède, tant auditif que visuel. Car c’est d’abord par son artwork que "Blood Lust" se démarque : le visage cauchemardesque d’une silhouette noire se détachant d’un fond uniforme au violet douteux sur lequel vient s’imprimer le nom du groupe, de l’album et des pistes à l’inspiration mystique, occulte et meurtrière ("Death’s Door", "I’m Here To Kill You", "13 Candles",…).
Deuxième essai des anglais, "Blood Lust" est un véritable choc et une réelle surprise. Combien de déconvenues en écoutant de bons albums mais au final utilisant toujours la même recette (et je pèse mes mots) ? Uncle Acid & The Deadbeats sont les artisans d’un son nouveau et frais, tout y est excellent et hautement addictif, c’est un groupe du présent qui s’est fait piquer ses idées dans les années 70 ! Et cette voix retro se fondant parfaitement dans une mer de riffs visqueux que Black Sabbath n’aurait pas renié !
Peu importe que vous soyez fâchés avec le rock rugueux ou que l’ambiance comateuse du doom vous fasse vous tenir à l’écart, jetez-vous sur ce "Blood Lust", un de ces albums qui vous font revoir vos standards à la hausse.
Release: Killarmy - Silent Weapons for Quiet Wars (1997)
Saturday, 14 April 2018
Album indispensable pour les amateurs de bon vieux Rap new-yorkais de la seconde moitié des années 90, "Silent Weapons For Quiet Wars" est le premier album de Killarmy, la plus célèbre affiliation du Wu-Tang Clan, sorte de deuxième cercle entourant les 9 MC principaux, antichambre de la gloire. Adeptes des voix douces posées sur des productions léchées, passez votre chemin.
Du nom d’un document dactylographié de 1986 émanant d’une organisation inconnue et se présentant comme un protocole de manipulation des masses au moyen de techniques non violentes baptisées métaphoriquement "armes silencieuses", l’album regorge de beats minimalistes extrêmes et sans concession produits en majorité par 4th Disciple, le reste l’étant par le maître The RZA.
Divisé en quatre parties : "nuclear", "chemical", "mental" et "physical" et évoluant autour d’une thématique très militaire, "Silent Weapons For Quiet Wars" s’approche de la perfection, si c’était un fondant au chocolat ce serait votre grand-mère qui l’aurait fait !
C’est l’album dont quelqu’un pourrait ne pas vous parler uniquement par désir de le garder pour lui… Killarmy y déploie une envie de montrer au monde ce qu’il a dans le ventre et une palette d’émotions et de rage qui ferait passer un gang bang interracial par une petite romance légère. Reprenant à son compte la base rythmique des débuts du hip-hop hardcore, mais balancée avec la puissance électronique qui s’affirme à l’époque, chacun pourra y trouver son compte parmi les classiques que sont "Dress To Kill", "Clash Of the Titans", "Blood For Blood", "Wake Up", "Fair, Love & War", "Full Moon" ou "Swinging Swords" (et son sample dément de "Swing! Brother, Swing!" de Billie Holiday).
Suivant directement le somptueux titre d’ouverture "Dress To Kill" dans lequel Killarmy se présente sans détour comme un groupe terroriste, "Clash Of the Titans" convoque dans l’ordre ShoGun Assasson, 9th Prince, Dom Pachino, Streetlife et Beretta 9 pour une démonstration de ce que le rap qui a des choses à prouver a de meilleur à offrir. Le groupe, assoiffé de reconnaissance, a l’ambition affichée de rivaliser avec les meilleurs et d’accéder à l’air raréfié des sommets, en revendiquant toutefois que ses membres restent des guerriers apôtres d’une violence très terre à terre balancée sur des samples exhumés d’un cimetière dont on aurait oublié l’emplacement.
Le sample de "Clash Of the Titans" d’ailleurs, parlons-en ! Arraché du trou noir de l’Histoire par un 4th Disciple au talent défiant toute logique et au courage inébranlable l’ayant conduit jusqu’aux tréfonds de la pop lyrique, il est issu de "Celeste Aida" (à partir de 1:45) du groupe 101 String, paru sur l’album "Opera Without Words" en 1958… et celui-là, je vous l’assure, il fallait aller le chercher ! L’ajout d’un piano dissonant a pour résultat un beat qui secoue les entrailles, soit vous oubliez le son juste après l’avoir écouté soit il vous marque les tympans au fer rouge, c’est le truc qui prend à la gorge, le morceau crade à enregistrer quand il ne reste plus que 3:40 à vivre.
Attachant à plus d’un titre, cet album n’est pas "bon" ou "mauvais", il est une flèche qui peut vous transpercer le cœur (d’où le faible niveau d’objectivité de cette chronique). Il se clôt sur un "5 Stars" qui ne ressemble en rien à un épilogue, Killarmy rempilera d’ailleurs dès l’année suivante pour un "Dirty Weaponry" plus mature mais tout autant recommandable.
Du nom d’un document dactylographié de 1986 émanant d’une organisation inconnue et se présentant comme un protocole de manipulation des masses au moyen de techniques non violentes baptisées métaphoriquement "armes silencieuses", l’album regorge de beats minimalistes extrêmes et sans concession produits en majorité par 4th Disciple, le reste l’étant par le maître The RZA.
Divisé en quatre parties : "nuclear", "chemical", "mental" et "physical" et évoluant autour d’une thématique très militaire, "Silent Weapons For Quiet Wars" s’approche de la perfection, si c’était un fondant au chocolat ce serait votre grand-mère qui l’aurait fait !
C’est l’album dont quelqu’un pourrait ne pas vous parler uniquement par désir de le garder pour lui… Killarmy y déploie une envie de montrer au monde ce qu’il a dans le ventre et une palette d’émotions et de rage qui ferait passer un gang bang interracial par une petite romance légère. Reprenant à son compte la base rythmique des débuts du hip-hop hardcore, mais balancée avec la puissance électronique qui s’affirme à l’époque, chacun pourra y trouver son compte parmi les classiques que sont "Dress To Kill", "Clash Of the Titans", "Blood For Blood", "Wake Up", "Fair, Love & War", "Full Moon" ou "Swinging Swords" (et son sample dément de "Swing! Brother, Swing!" de Billie Holiday).
Suivant directement le somptueux titre d’ouverture "Dress To Kill" dans lequel Killarmy se présente sans détour comme un groupe terroriste, "Clash Of the Titans" convoque dans l’ordre ShoGun Assasson, 9th Prince, Dom Pachino, Streetlife et Beretta 9 pour une démonstration de ce que le rap qui a des choses à prouver a de meilleur à offrir. Le groupe, assoiffé de reconnaissance, a l’ambition affichée de rivaliser avec les meilleurs et d’accéder à l’air raréfié des sommets, en revendiquant toutefois que ses membres restent des guerriers apôtres d’une violence très terre à terre balancée sur des samples exhumés d’un cimetière dont on aurait oublié l’emplacement.
Le sample de "Clash Of the Titans" d’ailleurs, parlons-en ! Arraché du trou noir de l’Histoire par un 4th Disciple au talent défiant toute logique et au courage inébranlable l’ayant conduit jusqu’aux tréfonds de la pop lyrique, il est issu de "Celeste Aida" (à partir de 1:45) du groupe 101 String, paru sur l’album "Opera Without Words" en 1958… et celui-là, je vous l’assure, il fallait aller le chercher ! L’ajout d’un piano dissonant a pour résultat un beat qui secoue les entrailles, soit vous oubliez le son juste après l’avoir écouté soit il vous marque les tympans au fer rouge, c’est le truc qui prend à la gorge, le morceau crade à enregistrer quand il ne reste plus que 3:40 à vivre.
Attachant à plus d’un titre, cet album n’est pas "bon" ou "mauvais", il est une flèche qui peut vous transpercer le cœur (d’où le faible niveau d’objectivité de cette chronique). Il se clôt sur un "5 Stars" qui ne ressemble en rien à un épilogue, Killarmy rempilera d’ailleurs dès l’année suivante pour un "Dirty Weaponry" plus mature mais tout autant recommandable.
Release: Recondite - On Acid (2012)
Saturday, 14 April 2018
La grosse claque. La pépite d’or, relique sacrée d’une lumineuse noirceur ramenée d’un pèlerinage aux confins d’un nouvel espace. Le disque tout droit venu de l’Olympe qui vous caramélisera les sens.
Tranquille et tentaculaire, comme un rêve primitif, le premier album de Recondite est un monument, la limite indécise entre deux états, une fugue duveteuse à la densité aérienne sans aucune fausse note, un condensé psychique vertigineux, un voyage immobile nous rappelant que la musique est l’art qui se rapproche le plus de la magie.
Pour l’art comme pour les avancées technologiques, les choses ne sont pas linéaires et on peut observer des sauts, des événements qui sont les déclencheurs d’un changement de paradigme. L’histoire de la musique est pleine de ces rythmes et de ces sons qui ont marqué leur temps, définissant souvent un genre à eux seuls. La ligne de basse "acide", crée avec le synthétiseur Roland TB-303 Bass Line et à origine de l’acid house, en est un des meilleurs exemples, désorientant et éblouissant les clubbers du monde entier avec ses oscillations frénétiques et ses textures inhumaines, stimulante même pour des corps et esprits déjà sur-stimulés.
Dans son livre "Generation Ecstasy", le critique musical Simon Reynolds a cette réflexion sur la musique Acid : "The 303 bass line is a paradox… an amnesiac hook, totally compelling as you listen, but hard to memorize or reproduce after the event, either as pattern or timbre. Its effect is mental dislocation" plaçant ce son de basse si spécifique "somewhere between a fecal squelch and a neurotic whinny, between the bubbling of volcanic mud and the primordial low-end drone of a didgeridoo".
Repenser l’acid est une gageure, et peu l’ont fait de manière convaincante*. Recondite, Lorenz Brunner de son vrai nom, en fait partie, son "On Acid" offrant une véritable expérience d’état modifié de conscience, évoquant de manière éloquente le plaisir diffus ("Felicity"), la patience mélancolique ("Tie In") et la recherche de la contemplation paranoïaque d’une réalité loin d’elle-même (la fragmentaire "Jaded"). Après une myriade d’EP très techno où brillent particulièrement les perles sonores que sont "Cleric" ou "Fiery", Recondite est au sommet.
Résolument minimale dans sa composition, "On Acid" dégage, dès la sublime introduction "Pertichor", une puissance inversement proportionnelle à la sobriété de ses arrangements. S’en suit un périple de modulations subtiles, de distorsions vaporeuses et de mutations complexes de la ligne mélodique organisé autour de la pièce centrale qu’est "Harbinger" où, à deux reprises, Recondite écrase les sons, les noie dans l’écho jusqu’à frôler l’implosion pour ensuite revenir à un rythme métronomique et lancinant, réveil placide après le songe d’une plongée en apnée.
A écouter fort.
* : Pepe Bradock, Achterbahn d’Amour, Donato Dozzy et Tin Man ont plutôt bien cerné ce sujet, et on pourrait même étendre l’analyse à certaines expérimentations d’Aphex Twin sur sa série "Analords".
Tranquille et tentaculaire, comme un rêve primitif, le premier album de Recondite est un monument, la limite indécise entre deux états, une fugue duveteuse à la densité aérienne sans aucune fausse note, un condensé psychique vertigineux, un voyage immobile nous rappelant que la musique est l’art qui se rapproche le plus de la magie.
Pour l’art comme pour les avancées technologiques, les choses ne sont pas linéaires et on peut observer des sauts, des événements qui sont les déclencheurs d’un changement de paradigme. L’histoire de la musique est pleine de ces rythmes et de ces sons qui ont marqué leur temps, définissant souvent un genre à eux seuls. La ligne de basse "acide", crée avec le synthétiseur Roland TB-303 Bass Line et à origine de l’acid house, en est un des meilleurs exemples, désorientant et éblouissant les clubbers du monde entier avec ses oscillations frénétiques et ses textures inhumaines, stimulante même pour des corps et esprits déjà sur-stimulés.
Dans son livre "Generation Ecstasy", le critique musical Simon Reynolds a cette réflexion sur la musique Acid : "The 303 bass line is a paradox… an amnesiac hook, totally compelling as you listen, but hard to memorize or reproduce after the event, either as pattern or timbre. Its effect is mental dislocation" plaçant ce son de basse si spécifique "somewhere between a fecal squelch and a neurotic whinny, between the bubbling of volcanic mud and the primordial low-end drone of a didgeridoo".
Repenser l’acid est une gageure, et peu l’ont fait de manière convaincante*. Recondite, Lorenz Brunner de son vrai nom, en fait partie, son "On Acid" offrant une véritable expérience d’état modifié de conscience, évoquant de manière éloquente le plaisir diffus ("Felicity"), la patience mélancolique ("Tie In") et la recherche de la contemplation paranoïaque d’une réalité loin d’elle-même (la fragmentaire "Jaded"). Après une myriade d’EP très techno où brillent particulièrement les perles sonores que sont "Cleric" ou "Fiery", Recondite est au sommet.
Résolument minimale dans sa composition, "On Acid" dégage, dès la sublime introduction "Pertichor", une puissance inversement proportionnelle à la sobriété de ses arrangements. S’en suit un périple de modulations subtiles, de distorsions vaporeuses et de mutations complexes de la ligne mélodique organisé autour de la pièce centrale qu’est "Harbinger" où, à deux reprises, Recondite écrase les sons, les noie dans l’écho jusqu’à frôler l’implosion pour ensuite revenir à un rythme métronomique et lancinant, réveil placide après le songe d’une plongée en apnée.
A écouter fort.
* : Pepe Bradock, Achterbahn d’Amour, Donato Dozzy et Tin Man ont plutôt bien cerné ce sujet, et on pourrait même étendre l’analyse à certaines expérimentations d’Aphex Twin sur sa série "Analords".
Release: Sandwell District - Feed-Forward (2010)
Saturday, 14 April 2018
Toute entrée est définitive. Les alchimistes de Sandwell District incorporent des éléments d’ambient à leur techno radicale et parviennent à parfaire à l’extrême le résultat de cette fusion dont ils sont passés maîtres. "Feed-Forward", leur unique album, est une balle perdue de l’underground.
Sandwell District est le nom d’un collectif de créateurs de musique électronique créé en 2002 et composé de Regis (Karl O’Connor), Female (Peter Sutton) et Function (Dave Summer) qui distille avec une fréquence aléatoire sa techno sombre et organique. Sorti de manière ultra confidentielle, les artistes s’effaçant derrière le nom du label, lui même absent de l’artwork sobrement punk, "Feed-Forward" est un manifeste qui replace la musique, et surtout la techno, au centre de tout.
Chargée en permanence d’une subtilité mélodique sous tension suivant des codes à la logique aussi impénétrables qu’une none catholique intégriste, Hunting Lodge, avec son rythme frénétique, est le sommet d’une montée permanente en intensité où les pistes calmes d’ambient feutré viennent accompagner et mettre en valeurs les multiples étapes d’un voyage où la techno sonne aussi pure que du cristal.
Les classifications portant sur un domaine technique et limité sont généralement bien admises, mais celles à vocation universelle et artistique ne peuvent faire abstraction d’un point de vue et sont, de ce fait, l’objet de nombreuses interprétations. La techno, telle qu’elle est pratiquée par Sandwell District, est toute autre que celle présente aujourd’hui dans l’imaginaire collectif.
Classer de la musique dans un style spécifique, c’est dire comment le travail de chacun se situe par rapport à celui des autres, et ces découpages conceptuels se distinguent en fonction du formalisme apporté aux relations entre ces styles et à l’arborescence qui en résulte. Chacun ayant tendance à surestimer l’objectivité de sa propre pensée classificatrice et le grand public étant par définition largement majoritaire en nombre, la techno « pure » a même finie par être perçue de manière négative par le grand public, trop violente, trop élitiste comparée à une techno plus dansante en réalité plus proche de la house.
L’abstraction de point de vue nécessaire à une classification objective semble donc mal s’accorder avec le domaine musical et l’art en général, touchant par définition à l’émotif. Mais n’est-ce pas réducteur de mettre à l’écart une réalité trop complexe pour être pensée de façon unitaire dans sa diversité, de s’extraire de la relativité constitutive de l’expérience, de risquer de passer à côté de l’expérience intense qu’est l’exploration de la matière sonore édifiée par Sandwell District et, in fine, d’assimiler la techno à un seul concept dansant?
Pour savoir que oui, c’est réducteur, appuyez sur play. Bordel.
Sandwell District est le nom d’un collectif de créateurs de musique électronique créé en 2002 et composé de Regis (Karl O’Connor), Female (Peter Sutton) et Function (Dave Summer) qui distille avec une fréquence aléatoire sa techno sombre et organique. Sorti de manière ultra confidentielle, les artistes s’effaçant derrière le nom du label, lui même absent de l’artwork sobrement punk, "Feed-Forward" est un manifeste qui replace la musique, et surtout la techno, au centre de tout.
Chargée en permanence d’une subtilité mélodique sous tension suivant des codes à la logique aussi impénétrables qu’une none catholique intégriste, Hunting Lodge, avec son rythme frénétique, est le sommet d’une montée permanente en intensité où les pistes calmes d’ambient feutré viennent accompagner et mettre en valeurs les multiples étapes d’un voyage où la techno sonne aussi pure que du cristal.
Les classifications portant sur un domaine technique et limité sont généralement bien admises, mais celles à vocation universelle et artistique ne peuvent faire abstraction d’un point de vue et sont, de ce fait, l’objet de nombreuses interprétations. La techno, telle qu’elle est pratiquée par Sandwell District, est toute autre que celle présente aujourd’hui dans l’imaginaire collectif.
Classer de la musique dans un style spécifique, c’est dire comment le travail de chacun se situe par rapport à celui des autres, et ces découpages conceptuels se distinguent en fonction du formalisme apporté aux relations entre ces styles et à l’arborescence qui en résulte. Chacun ayant tendance à surestimer l’objectivité de sa propre pensée classificatrice et le grand public étant par définition largement majoritaire en nombre, la techno « pure » a même finie par être perçue de manière négative par le grand public, trop violente, trop élitiste comparée à une techno plus dansante en réalité plus proche de la house.
L’abstraction de point de vue nécessaire à une classification objective semble donc mal s’accorder avec le domaine musical et l’art en général, touchant par définition à l’émotif. Mais n’est-ce pas réducteur de mettre à l’écart une réalité trop complexe pour être pensée de façon unitaire dans sa diversité, de s’extraire de la relativité constitutive de l’expérience, de risquer de passer à côté de l’expérience intense qu’est l’exploration de la matière sonore édifiée par Sandwell District et, in fine, d’assimiler la techno à un seul concept dansant?
Pour savoir que oui, c’est réducteur, appuyez sur play. Bordel.
Release: Distance - My Demons (2007)
Saturday, 14 April 2018
Deux ans après le superbe EP "1 On 1", Distance récidive avec cette longue plongée en eaux troubles qui fait, encore aujourd'hui, office de modèle du genre.
A la fois langoureux et tribal, "My Demons" est un condensé d’ondes vibrantes et graves d’un autre monde que les multiples effets de spatialisations décuplent parfaitement. Naviguant entre science-fiction d’anticipation et désolation urbaine ("Tuning" contient des samples du film "Dark City" de 1998), l’ensemble est un miroir de nos angoisses intérieures perfusées aux lignes de basses gutturales ("Confined") et embrouillées par la fumée des usines et le bruit des machines.
Du mélodique titre éponyme "My Demons" au tonitruant "Traffic" et son énorme tuerie à 2:44, cet album à la personnalité débordante et à la puissance ravageuse retranscrit toute la noirceur du dubstep originel. Les basses chaleureuses cèdent ainsi leur place à des lignes mélodiques ultra sourdes et la batterie et les cuivres à des breaks technoïdes syncopés. Dans la continuité du dub et de la musique électronique anglaise, la ligne de basse est encore et toujours au centre de tout, et les deux titres d’introductions "Night Vision" et "My Demons" devraient aisément vous en convaincre.
Un album plutôt rigoureux qui laisse quand même plusieurs portes ouvertes, les néophytes peuvent ainsi s’y aventurer avec bon espoir d’y trouver quelque chose à se mettre sous la dent. La dernière piste est la sublissime et atmosphérique "Delight", un final paisible après un tour de montagne russe nocturne qui vous retournera les tripes. Distance, en bon cavalier, vous offre une part de l’apocalypse.
A la fois langoureux et tribal, "My Demons" est un condensé d’ondes vibrantes et graves d’un autre monde que les multiples effets de spatialisations décuplent parfaitement. Naviguant entre science-fiction d’anticipation et désolation urbaine ("Tuning" contient des samples du film "Dark City" de 1998), l’ensemble est un miroir de nos angoisses intérieures perfusées aux lignes de basses gutturales ("Confined") et embrouillées par la fumée des usines et le bruit des machines.
Du mélodique titre éponyme "My Demons" au tonitruant "Traffic" et son énorme tuerie à 2:44, cet album à la personnalité débordante et à la puissance ravageuse retranscrit toute la noirceur du dubstep originel. Les basses chaleureuses cèdent ainsi leur place à des lignes mélodiques ultra sourdes et la batterie et les cuivres à des breaks technoïdes syncopés. Dans la continuité du dub et de la musique électronique anglaise, la ligne de basse est encore et toujours au centre de tout, et les deux titres d’introductions "Night Vision" et "My Demons" devraient aisément vous en convaincre.
Un album plutôt rigoureux qui laisse quand même plusieurs portes ouvertes, les néophytes peuvent ainsi s’y aventurer avec bon espoir d’y trouver quelque chose à se mettre sous la dent. La dernière piste est la sublissime et atmosphérique "Delight", un final paisible après un tour de montagne russe nocturne qui vous retournera les tripes. Distance, en bon cavalier, vous offre une part de l’apocalypse.
Release: Actress - Splazsh (2010)
Saturday, 14 April 2018
Actress c’est le genre de musicos pas trop clair, le mec de l’équipe un peu atypique qui a des fulgurances sublimes de temps à autre.
House lo-fi et hybride à l’ambiguïté déviante et au charme énigmatique certain, "Splazsh" s'inspire d'une myriade de styles tous affiliés à la musique électronique. Après son superbe premier album "Hazyville" sorti en 2008 qui s’ouvrait sur la folle décoction électronique "Again the Addiction", cette nouvelle livraison de Darren J. Cunningham vous passera le cerveau au shaker.
Envoûtantes abstractions au groove aventureux, "Splazsh" est un bloc hétérogène qui emprunte des sentiers équivoques pour vous mener à une destination qu’Actress lui-même ne semble pas connaitre tant le chemin est tortueux, évoluant au gré de son inspiration sauvage et spontanée. Impulsives ou travaillées, impossible de déterminer ce que sont des pistes comme "Bubble Buts and Equations" et son bricolage lo-fi (et ce kick !), "The Kettle Men" et sa lente montée mégalomane, la French touch sous alcaloïde de "Purrple Splazsh" ou ce "Get Ohn (Fairlight Mix)", expression parfaite de l’ivresse, qui pourra être soit simple fond sonore soit parfaite transition entre une soirée de techno bien deep et son after psychédélique enfumé d’anthologie avec les quelques rares potes qui tiennent encore debout.
Pour le moins complexe, pointu et difficilement accessible, l’œuvre d’Actress divise autant qu’elle fascine. Adepte de l’expérimentation plus que de l’équilibre, de la liberté plus que de la sécurité (en témoigne le gouffre qui sépare "Maze", sommet de composition organique chaude et fantomatique et le titre "Wrong Potion", sans concession, qui ferrait fondre n’importe quel dancefloor), "Splazsh" est un album nécessaire que je vous conseille fortement d’apprendre à aimer.
House lo-fi et hybride à l’ambiguïté déviante et au charme énigmatique certain, "Splazsh" s'inspire d'une myriade de styles tous affiliés à la musique électronique. Après son superbe premier album "Hazyville" sorti en 2008 qui s’ouvrait sur la folle décoction électronique "Again the Addiction", cette nouvelle livraison de Darren J. Cunningham vous passera le cerveau au shaker.
Envoûtantes abstractions au groove aventureux, "Splazsh" est un bloc hétérogène qui emprunte des sentiers équivoques pour vous mener à une destination qu’Actress lui-même ne semble pas connaitre tant le chemin est tortueux, évoluant au gré de son inspiration sauvage et spontanée. Impulsives ou travaillées, impossible de déterminer ce que sont des pistes comme "Bubble Buts and Equations" et son bricolage lo-fi (et ce kick !), "The Kettle Men" et sa lente montée mégalomane, la French touch sous alcaloïde de "Purrple Splazsh" ou ce "Get Ohn (Fairlight Mix)", expression parfaite de l’ivresse, qui pourra être soit simple fond sonore soit parfaite transition entre une soirée de techno bien deep et son after psychédélique enfumé d’anthologie avec les quelques rares potes qui tiennent encore debout.
Pour le moins complexe, pointu et difficilement accessible, l’œuvre d’Actress divise autant qu’elle fascine. Adepte de l’expérimentation plus que de l’équilibre, de la liberté plus que de la sécurité (en témoigne le gouffre qui sépare "Maze", sommet de composition organique chaude et fantomatique et le titre "Wrong Potion", sans concession, qui ferrait fondre n’importe quel dancefloor), "Splazsh" est un album nécessaire que je vous conseille fortement d’apprendre à aimer.
EP mythique des anglais Iration Steppas, sorti 7 ans après leur premier album Original Dub D.A.T., on y retrouve tous les ingrédients qui ont fait leur réputation, à commencer par un son ultra lourd et sans concession.